Et c'est un député qui a signé la loi qui vous le dit ! Effarant... et le silence des intéressés (sauf quelques-uns comme ici) qui continue à être si assourdissant!
mots-nomades de Patrice Favaro - Page 48
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Qu'ils crèvent les auteurs: vous allez tomber de haut!
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Qu'ils crèvent les auteurs: oraison funèbre!
La question soulevée est pourtant simple et claire... des réponses pour enfumer... et un hémicycle quasi vide... c'est ce qu'on appelle un bel enterrement!
Livres indisponibles preuve impossible par SamuellegoffObservez bien la fin de la séquence, la "gestuelle" du ministre de l'a-culture commettant son forfait parle d'elle-même.
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Qu’ils crèvent les auteurs ! Autorisation de libre pillage.
Les coups qui visent à faire définitivement exploser les droits moraux et économiques des auteurs (au profit de l’ultralibéral « copyright », faut-il le rappeler) pleuvent ces derniers temps. Dernier coup de coup de couteau dans le dos et pas des moindres, celui que vient de lui porter unanimement l’Assemblée Nationale et le Sénat avec la bénédiction (complicité ?) de la BNF, du SNE et de la SGDL en votant la loi relative à l’exploitation numérique des livres indisponibles du XXe siècle. (Texte définitif à lire ici)
De quoi s’agit-il ? Cette loi vise à rendre accessible sous forme numérique l’ensemble de la production littéraire française du XXème siècle dès lors que les œuvres ne sont plus exploitées commercialement. Elle prévoit que la BNF recensera dans une banque de données publique l’ensemble desdites œuvres dont l’exploitation sera gérée par une Société de perception et de répartition des droits (SRPD) qui assurera, de façon paritaire, une rémunération aux éditeurs et aux auteurs.
Officiellement comme l’a rappelé à la tribune un Frédéric Mitterrand (qui n’en est plus à son coup d’essai) les élus entendent « démontrer que la diffusion des œuvres sur internet peut se faire sans exception au droit d'auteur et sans pratique de contrefaçon. »
Faux, totalement faux. Cette poudre aux yeux ne vise qu’à donner le change face au pillage généralisé mené par des entreprises comme Google Books. Le change pour dissimuler une totale impuissance face à ce type de multinationale. On prétend « cadrer » l’exploitation numérique des livres qui répondent à l’article L. 134-1. – On entend par livre indisponible au sens du présent chapitre un livre publié en France avant le 1er janvier 2001 qui ne fait plus l’objet d’une diffusion commerciale par un éditeur et qui ne fait pas actuellement l’objet d’une publication sous une forme imprimée ou numérique.
En fait, on autorise tout simplement le libre pillage de ces mêmes œuvres en montant une usine à gaz qui n’aura jamais les moyens de fonctionner équitablement. Ainsi les apparences sont sauves du côté des élus et leur incompétente impuissance demeure masquée aux yeux du public, quant aux tenants du libre marché, ils s’en frottent les mains
On va donc permettre, après création d’une base de données par la BNF, la reproduction et sa représentation sous une forme numérique de tout livre répondant à la définition citée plus haut par une société de perception et de répartition des droits agréée à cet effet par le ministre chargé de la culture (art. L. 134-3. – I) Ben, voyons !
Les auteurs pourront-ils s’y opposer ? Oui… mais en faisant une demande spécifique auprès de la BNF (on ne leur demandera donc jamais leur avis au préalable !) et uniquement pour la raison suivante : L. 134-3. – l’auteur d’un livre indisponible peut s’opposer à l’exercice du droit de reproduction ou de représentation de ce livre s’il juge que la reproduction ou la représentation de ce livre est susceptible de nuire à son honneur ou à sa réputation.
Oui, vous avez bien lu, si vous n’êtes pas LF Céline et n’avez pas commis des monstruosités comme Bagatelle pour un massacre… eh, bien vous n’aurez rien à dire !
Voilà comment on entend enterrer une bonne fois pour toutes le droit moral d’un auteur (et je ne parle même pas ici du volet économique sur lequel je reviendrai). Un peu de pédagogie, voici comment se passaient les choses jusqu’à aujourd’hui :
- j’écris un texte qui se trouve être le fruit de mon seul travail
- un éditeur s’y intéresse et souhaite le publier
- je signe avec lui un contrat de cession qui l’autorise à exploiter ce texte sous forme de livre ou sur un autre support déterminé
- dès lors que cet éditeur n’exploite plus cette œuvre, c'est-à-dire qu’il ne peut répondre à la demande d’achat formulée par un client, et passé un délai (un à deux ans selon les clauses), l’auteur envoie une lettre recommandée (ce qui est déjà une entorse au droit le plus élémentaires, mais bon, passons) et il récupère les droits de cession qu’il avait cédés à l’éditeur, étant donné que la propriété morale sur son œuvre n’a jamais été vendue puisqu’elle est censée être inaliénable. En cas de réédition envisagée, le processus que je viens de citer se remettra tout bonnement en route sur l’ensemble de tous les points.
Eh bien ! Aujourd’hui tout cela est terminé ! Tous mes textes qui ont été publiés avant le 1er janvier 2001 et qui ne sont plus au catalogue d’une maison d’édition… ne m’appartiennent plus. Du vol, du vol légalisé certes, mais du vol caractérisé. Pourquoi ?
1 Parce qu’il n’y aura tout bonnement plus besoin du moindre document contractuel pour republier un livre, l’avis de l’auteur à cette nouvelle publication (fut-elle numérique) ne lui sera pas même demandée. Je n’aurai donc plus aucune possibilité par exemple de voir mon ouvrage réédité sous forme papier, quel serait l’éditeur assez fou pour le faire ?
2 Parce que je n’ai pas la moindre idée des contreparties qui me seront accordées par une société de répartition dont je ne sais absolument rien ! J’ai cependant quelque raison de m’en inquiéter en entendant Bruno Racine, directeur de la BNF, expliquer sur France Inter que les œuvres choisies seraient commercialisées « à des prix très compétitifs, parce qu'ils seront uniquement vendus en numérique ».
3 Parce que je sais aussi que le dispositif sera si lourd qu’il deviendra vite obsolète (qu’on examine comment la SOFIA (qui gère pour partie les droits de prêts en bibliothèque) s’en tire et on aura une idée de la mission impossible.
3 Parce que cette société au profil indistinct (j’ai écrit profil… pas profit !) va également à l’article L. 134-3 autoriser gratuitement les bibliothèques accessibles au public à reproduire et à diffuser sous forme numérique à leurs abonnés les livres indisponibles conservés dans leurs fonds dont aucun titulaire du droit de reproduction sous une forme imprimée n’a pu être trouvé dans un délai de dix ans à compter de la première autorisation d’exploitation.
Eh oui, enterré le délai de 50 ans ou de 70 ans ! Tous ceux qui se sont opposés au droit de prêt en bibliothèque tiennent enfin leur revanche. Qu’ils crèvent les auteurs ! Calimaq, bibliothécaire et juriste allant même jusqu’à prétendre que : « … toute forme d'accès gratuit à la culture dérange, fût-ce au nom de l'intérêt général, et que l'exploitation commerciale est conçue comme l'alpha et l'oméga en matière de droit d'auteur. Le droit à la culture, à la connaissance et à l'information sont systématiquement balayés face à la toute-puissance de la propriété intellectuelle, conçue comme un dogme que rien ne doit entamer. » Rien que ça ! Mais pourquoi donc tant de haine?
Que se cache donc derrière tout ce prétendu dispositif de protection des auteurs, le baiser de la mort en vérité, et la vindicte à laquelle certains en appellent quand ces mêmes auteurs réclament le respect du droit durement acquis de rester maître de leurs œuvres et d’en tirer un minimum de rétribution comme c’est les cas pour tout secteur d’activité ?
Je ne vois malheureusement que trois explications. La première est que le concept de droit d’auteur gêne le libre marché sans contrainte. C’est un dispositif trop lourd et donc trop couteux à leur sens. Celui du copyright répond bien mieux à leur aspiration : tu écris, on te donne quelque chose et on ne te revoie plus jamais ! J’appelle cela le système Chuck Berry. Vous composez un des standards du rock, Johnny B Good, pour lequel une major vous a offert en guise de rétribution unique et définitive un billet de 50 dollars (accepté parce que vous étiez dans la dèche !).
L’autre raison de cette mise à mort qui ne suscite aucune forme de compassion ni d’empathie, tient à ‘idée que le public se fait d’un auteur. Pour ne voir sur les plateaux télé que ceux qui sont au faîte d’une quelconque gloire médiatique, qui ont des tirages mirobolants, des avaloirs houellebecquiens, on s’imagine, hélas, que le quotidien d’un auteur est en tout point semblable à celui de JK Rowling… et de l’envie à la haine… il n’y a visiblement qu’un pas que d’aucun ont allègrement franchi.
La troisième tient au marché de dupes. Les tenants du tout accessible et du tout gratuit ne supportent plus l’idée d’avoir à payer des droits aux auteurs… mais ils ne s’offusquent jamais de payer à de prix ahurissants les appareils qui permettent d’y avoir accès. Ils vont même camper devant la FNAC pour être les premiers à posséder ce genre d’objet dès sa sortie. Ils ne s’offusquent jamais non plus d’avoir à payer des fournisseurs d’accès dont les marges et les profits sont les plus colossaux de tous les temps. Non, que tout cela ne soit pas gratuit ne les dérage pas. Il est vrai que l’esclave chérit sa chaîne.
Premier ajout:
On peut consulter intégralemet le débat à l'Assemblée ici, il faut passer le début de la page web qui est consacré aux questions d'ordre général pour aller à directement à "Exploitation numérique des livres indisponibles du xxe siècle Discussion des articles."
Le fait que les auteurs soient totalement exclus du mécanisme législatif mis en place a été relevé plusieurs fois par un député, de la majorité pourtant, mais chacune de ses observations a été balayé d'un revers de main par F. Mitterand. Quant à la gauche, elle ne s'en est pas plus émue.
Cet article, écrit sous le coup d’une profonde indignation, nécessitera sans doute d’être précisé. Vu l’urgence de la situation, j’ai préféré le mettre en ligne ainsi. On m’excusera donc pour ses imperfections et les suggestions seront les bienvenues.
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Qu’ils crèvent les auteurs !
En juillet 1985, j’ai eu le privilège d’assister à Avignon à une pièce de Tadeuz Kantor, le prophétique « Qu’ils crèvent les artistes ! ». La pièce avec la présence de Kantor lui-même sur le plateau mettait en scène sa propre mort (elle allait survenir 5 ans plus tard), mais aussi plus généralement celles des artistes face à un pouvoir totalitaire.
Bust of Tadeusz Kantor in Celebrity Alley in Kielce (Poland) Date 14 septembre 2006 Source Travail personnel Auteur Paweł Cieśla
Une extrait de la vidée tournée à cette occasion pour l’INA ici
J’avais été profondément choqué par la violence et la désespérance de cette œuvre, je la comprends mieux aujourd’hui en voyant dans quelle a-culture nous baignons dans notre pays. Je la comprends mieux également en observant le rôle dans lequel on entend enfermer exclusivement les artistes, les acteurs, celui de sympathique gugusse amuseur de la galerie et oscarisable à la « Dujardin », ou encore celui d’analgésique à puissant effet tranquillisant comme « Intouchables ».
1985 – 2012… les choses avancent, car on peut désormais s’écrier : Qu’ils crèvent les auteurs !
Les pires coups portés au droit d’auteur l’ont presque toujours été par les auteurs eux-mêmes. Il y ont depuis longtemps mis un bel acharnement.
Qu’on se souvienne de la bataille autour du droits de prêts en bibliothèque dont plus personne ne conteste le juste principe aujourd’hui[1].… Ceux qui se montrèrent les plus virulents contre ce droit étaient des écrivains eux-mêmes dont certains, éminents professeurs de la Sorbonne ou encore exerçant de lucratives professions libérales, poussaient des cris d’orfraie sur le thème : « Nous, nous n’écrivons pas pour de l’argent ! »
À ce propos je viens de recevoir un chèque concernant mes droits de prêt en bibliothèque et de reprographie pour 2009 (les auteurs, illustrateurs et traducteurs ont tout leur temps comme chacun le sait… ils ne touchent leur argent que trois ans plus tard !), oui, donc pour 2009 mon chèque s’élève à la faramineuse somme de 149 euros ! Oui, vraiment nous autres auteurs sommes d’horribles nantis, de vrais nababs !
Je me souviens également que, lorsque nous avions tenté avec Thierry Lenain et quelques-autres de reprendre une idée chère à Jean Zay sur le « travail » des écrivains en réclamant un droit fixe d’un euro sur tout exemplaire, vendu, soldé, distribué d’une manière ou d’une autre… une illustratrice fameuse m’avait confié qu’elle trouvait cela « Vulgaire ! Demander un euro, ça ressemble à de la mendicité ! »
Une coutume donc chez nous autres auteurs: scier la dernière branche sur laquelle nous pouvons encore prendre refuge. Aujourd’hui, c’est François Bon qui s’y colle dans le rôle de l'élagueur en traduisant et en publiant pour son compte le texte d’un des ses chers et respectés collègues (Le vieil homme et la mer, d’Ernest Hemingway, excusez du peu) dont les droits d’auteur ne lui appartiennent pas. C’est Gallimard qui en est le dépositaire pour les ayant-droit en France, et la maison qui n’a rien de philanthropique comme chacun le sait, lui frappe sur les doigts. Aussitôt Internet s’enflamme, ça « twitte » à tout va… sur ces « salauds d’ayant droit » !
Le problème ici n’est pas de donner raison à l’une (le gentil auteur) ou l’autre (le méchant éditeur) des ces figures archétypales , mais de constater que l’occasion était vraiment rêvée pour certains de pouvoir à bon compte tenter de faire exploser ce qui leur paraît être un archaïsme insupportable : le droit d’auteur. Ce qui est éminemment dommageable, c’est que cela laisse entendre, et cela n’a pas manqué de se faire entendre, qu’une œuvre comme Le vieil homme et la mer devrait appartenir à tout un chacun dans un délai bien plus court. "Passé un seuil, la popularité dépossède les auteurs de la propriété de leur livre" nous dit dans un article cité plus bas Nicolas Gary. Curieuse logique, mais pourquoi alors ne pas l'appliquer à tout? Allons donc tous dormir gratuitement au George V et manger au restaurant du Ritz!
L'argument est donc falacieux, mais aussitôt les idolâtres du libre marché s'en sont emparé, qu'elle aubaine pour eux et de s'écrier: vite, que les droits d’auteur se trouvent réduits à une durée égale à celle d’un brevet industriel : 20 ans, tout au plus ! Lire ici l'article d'Actualité Littéraire pour en avoir un aperçu. Merci François Bon, vous qui étiez également si farouchement opposé au prêt en bibliothèque, d’avoir tendu le manche pour nous faire battre, affreux privilégiés que nous sommes ! La boucle sera donc sous peu bouclée: le texte, les illustrations, les traductions ne seront bientôt plus qu'un simple produit sous brevet, comme un presse-purée ou un détergent. Et il faut bien être naïf (la naïveté est la paresse de l'esprit) pour s'imaginer que cela favorisera l'accès aux livres pour les plus démunis. Faisons confiance pour cela aux industriels du livre numérique, tiens ! Quant aux auteurs, seuls surnageront bientôt ceux qui seront "bankables" comme on dit chez les gros diffuseurs, ces propriétaires d'énormes tuyaux qui inondent nos écrans... Les autres, désormais des écrivaillons puisque non-bankables, pourront toujours se faire un peu d'argent de poche comme c'est déjà le cas avec ces sites qui proposent de mettre en vente les photos que ceux qui en sont les auteurs trop naïfs leur confient:
Chez Fotolia, Istockphoto ou Dreamstime avec un peu de temps, du talent et de la passion, vous pouvez tester l’attractivité de vos prises de vue. Impératif : vos photos doivent être d’excellente qualité. Une fois que vous avez sélectionné vos meilleurs clichés, créez votre compte et mettez-les en ligne. Des acheteurs potentiels viennent ensuite faire leur marché parmi vos images disponibles. Sachez qu’une fois vos fichiers vendus, ils peuvent être utilisés sans limite de temps ni de nombre de diffusions et se retrouver sous forme de publicités, d’illustration d’articles, de communiqués de presse.
Oh! le beau futur que voilà!
Et dans tout ce débat, ce déballage, qui, je dis bien qui a évoqué le "droit moral de l'artiste et du créateur sur son oeuvre"?... (Lisez bien les commentaires laissés sur cette page web de la Maison des Artistes pour juger de la situation actuelle.)
Il est vrai que ce droit moral-là, lui gît déjà. De profundis. L'autre suivra sous peu, soyez rassurés apôtres de la gratuité à tous crins, vous qui oubliez que "si c'est gratuit, c'est parce que c'est vous le produit!". Amen !
[1] Adopté à l’unanimité par le Sénat le 8 octobre 2002, le projet de loi relatif au droit de prêt vint ensuite en première lecture à l’Assemblée Nationale le 2 avril 2003. Et c’est ainsi que la loi française fut définitivement adoptée par le Parlement, le 18 juin 2003, loi relative à la rémunération au titre du prêt en bibliothèque et renforçant la protection sociale des auteurs.
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Un autre 22 février
Je parlais de Stefan Zweig aujourd'hui même avec Françoise et je lui rappelai que l'écrivain et sa femme, Charlotte Lotte Elizabeth Altmann, s'étaient tous deux suicidés. Je savais que Zweig était désespéré par les ténébres qu'il voyait se répandre sur l'Europe mais je ne me rappelais plus exactement des détails. De retour chez nous, j'éprouvai donc la nécessite de rafraîchir ma mémoire et je consultai sa biographie.
Etrange coïncidence, c'était un 22 février aussi, comme aujourd'hui... et la gorge serrée, j'ai lu ce qui suit.
Le 22 février 1942, après avoir fait ses adieux et laissé ses affaires en ordre, Stefan Zweig met fin à ses jours, en compagnie de Lotte qui refusa de survivre à son compagnon.
Le message qu'il a laissé:
"Avant de quitter la vie de ma propre volonté et avec ma lucidité, j'éprouve le besoin de remplir un dernier devoir : adresser de profonds remerciements au Brésil, ce merveilleux pays qui m'a procuré, ainsi qu'à mon travail, un repos si amical et si hospitalier. De jour en jour, j'ai appris à l'aimer davantage et nulle part ailleurs je n'aurais préféré édifier une nouvelle existence, maintenant que le monde de mon langage a disparu pour moi et que ma patrie spirituelle, l'Europe, s'est détruite elle-même.
Mais à soixante ans passés il faudrait avoir des forces particulières pour recommencer sa vie de fond en comble. Et les miennes sont épuisées par les longues années d'errance. Aussi, je pense qu'il vaut mieux mettre fin à temps, et la tête haute, à une existence où le travail intellectuel a toujours été la joie la plus pure et la liberté individuelle le bien suprême de ce monde.
Je salue tous mes amis. Puissent-ils voir encore l'aurore après la longue nuit ! Moi je suis trop impatient, je pars avant eux."
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Jour de lassitude
Il est des jours qui pèsent plus que d’autres. Fatigue, usure, mais plus encore « affligement », pardon pour ce néologisme, mais je ne peux imaginer un mot plus juste. Oui, je suis affligé de voir les valeurs que je défends mises à mal chaque jour par le psychotique élyséen, dont les discours aux relents haineux, débordant de mépris, sont entonnés et amplifiés par une horde de laquais dont l’énergie redouble à l’idée qu’il pourraient perdre leurs miettes du gâteau, par des médias serviles et achetés, et enfin par des microcéphales consentant à mettre eux-mêmes la tête sur le billot, celui que leur tend le boucher en leur faisant les yeux doux.
Affligé par tout cela mais pas seulement… Affligé aussi par une littérature de jeunesse où (à quelques rares exceptions comme chez Magnier, Actes Sud, Vents d’Ailleurs et quelques rares maisons d’édition encore) l’on s’en tient au rôle du joueur de flute de Hamelin. Noyés les enfants qui écoutent la musique sirupeuse, endormante,des marchands de livres… noyés sous une cascade de bouquins ineptes, prétenduement positifs, faussement optimistes… divertissants… Le mots est affreux : divertissement… Le dictionnaire historique du français d’Alain Rey nous dit : 1494, au sens propre, action de détourner de l’argent ou des biens au profit de quelqu’un. La belle littérature de « divertissement » que nous offrent les Muchamore, les Stephenie Meyer, la «shit lit » (le détournement orthographique est volontaire !), les marchands de « vampireries », de « dragonneries » et de fantasy dont les héros pourfendeurs défendent les valeurs d’une « civilisation supérieure à d'autres » à grands coups barbares d’épée dans la gueule…
Noyés sous ce flot incessant de pages anesthésiantes, prétexe à lobotomie, qui sortent des rotatives, ces étalages de couvertures qui clignotent pour mieux hypnotiser le client, oui, noyés les bouquins des amis Philippe Godard, de Jean-Yves Loude, ceux de Françoise Malaval, et les miens tout autant. Tellement noyés… que les libraires spécialisés jeunesse du réseau Sorcières… oui, oui, les "spécialistes", n’ont jamais eu le temps en dix-sept années de chroniquer un seul de mes bouquins (il y en a eu une bonne trentaine pourtant!) dans leur publication papier ou sur le Web…
Alors, durant ces jours d’affligement, je repense à une scène vue au salon du livre de Paris, il y a trois ou quatre ans. Derrière sa table, sur le stand des éditions de l’Olivier, John Berger, oui, le grand Berger, l’un des auteurs contemporains que je respecte le plus, un de ceux qu’on ne voit jamais frétiller de l’égo sur un plateau de télé, un de ceux qui regardent le monde avec acuité tout en se tenant à l’écart, comme Hubert Mingarelli (qui a fini par déserter pour les mêmes raisons l’écriture pour la jeunesse)… John Berger donc, devant qui les « lecteurs » du salon de Paris déambulaient sans s’arrêter, John Berger qui, malgré l’heure qui passait, n’avait pas encore dédicacé un seul de ses bouquins…
Oui je repense à cette scène et je me sens moins seul…
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Un monde sans droit d'auteur... c'est un monde sans auteur
"Le droit d'auteur repose sur deux raisonnements complémentaires : le créateur doit pouvoir contrôler l'usage de son œuvre, de manière à prévenir sa déformation ou son exploitation dans des conditions qu'il jugerait dégradantes ; il doit tirer un bénéfice financier de sa création, de manière à pouvoir vivre de son travail sans dépendre matériellement de mécènes intéressés ou d'un quelconque pouvoir religieux ou politique. Le droit d'auteur, en un mot, garantit la liberté morale et matérielle des artistes et des créateurs."
C'est un extrait du très intélligent article de Laurent Joffrin (que je ne goûte guère habituellement) publié dans le Nouvel Obs et à lire ci-dessous
Droit d'auteur : l'infantilisme des pirates du Net
Il semblerait que les tentative pour protéger les droits des créateurs – et leurs revenus – soient supposées battre en brêche les libertés individuelles. Mais c'est bien ainsi qu'on piétine avant tout la première d'entre elles: la liberté d'expression des créateurs et le droit qu'ils ont à disposer de leur oeuvres comme ils l'entendent y compris contre une naturelle rétribution financière (ce qui n'est d'ailleurs pas toujours le cas, loin s'en faut... mes pièces de théatre par exemple peuvent être jouées gratuitement si c'est par des amateurs après m'en avoir demandé l'autorisation).
Le jour où ce droit n'existera bel et bien plus, ce sera alors le temps où seuls les sites prétendument gratuits, mais en fait financés par la pire des pubs, nous serviront la même soupe partout et pour tous... gratuite, la soupe... oui, le pire des brouets, pardonnez-moi, de la merde commerciale !
Un des pros de chez Microsoft je crois a dit sur France Culture il y a quelques jours: SI C'EST GRATUIT, C'EST QU'EN VERITE LE PRODUIT... C'EST TOI!
à méditer avant toute éructation numérique contre ces auteurs qui se croient permis d'exister!
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Une lecture indispensable!
Vient de paraître de l'ami Philippe Godard: Cinq discours pour désobéir aux éditions Syros.
Le discours de Chef Joseph est un monument inconnu à découvir de toute urgence! Un résumé et une dénonciation sans appel de tout système colonial, de toute oppression économique, raciale, politique. Les commentaires de Philippe Godard à ces cinq discours ont la clarté, la limpidité et le tranchant du diamant! Avec lui, désobéissons!
Surtout ne vous laissez pas arrêter par la couverture qui pourrait laisser supposer qu'on se trouve en présence d'un bouquin consacré à la soumission chez les sado-masos! Non, non ! Cette couv est totalement ratée et surtout en complet contresens avec le contenu. Une fois de plus chez Syros on a confié la couv d'un ouvrage à un directeur artistique qui ne prend pas le temps de lire les textes. A moins qu'il ne soit analphabète. C'est déplorable!
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Editer pour le Jeunesse en Inde
Mariette Robbes, est une ancienne étudiante du Master Monde du livre de l'Université de Provence et elle a travaillé dans la maison d'édition Katha à Delhi. Elle a réalisé un mémoire de recherche vriament très interessant et parfaitement documenté sur l'édition indépendante pour la jeunesse en Inde.
Editer pour le Jeunesse en Inde, contextes, enjeux et politiques éditoriales
Ce mémoire est téléchargeable à l'adresse suivante :
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Inde... graphique
Inde, le pays des murtis... des images...
Chennai (ex Madras décembre 2011)
Hyderabad, décembre 2011
et même avec un objet banal... ça devient tout de suite de l'art...