Entrée du personnel documentaire à voir de Manuela Frésil. Ce qu'en dit Olivier Séguret (extrait)
Au fil du film, on comprend aussi que ces métiers de l’abattage rendent littéralement malades leurs employés et que, très fréquemment, ils souffrent de maux situés «là où on coupe les bêtes», preuve supplémentaire, s’il en fallait, du dérèglement contre-nature au prix duquel une telle industrie peut exister. «La nuit, je rêvais de la chaîne, rapporte un témoin, mais c’est plus les cochons qu’étaient pendus, c’était les êtres humains. C’est la viande qui fait ça.»
De la viande 100% pure peur (article en entier sur Libé ci-contre)
C'est quelque chose de voisin que je décris dans mon roman La vérité crue (éditions Thierry Magnier, 2012):
extrait:
— Ouais, c’est ça, pour rouler ma bosse à travers le pays. J’fais des petits boulots, ceux dont personne ne veut. Les plus moches. Comme pour l’élevage de visons. Avec la vie que j’ai eue, j’ai appris à encaisser, mon seuil à moi, il faut aller loin pour le trouver, très loin. Pendant quelques semaines, j’ai travaillé dans un abattoir. C’est vrai ce que t’as dit tout à l’heure : si les gens savaient ce qui s’y passe… des bêtes mal assommées, encore conscientes, suspendues à des crochets et qu’on… Mais celui-là d’abattoir, c’était pas le pire, les choses se faisaient aussi bien que possible. Chaque homme, parce qu’il y a que des hommes qui travaillent là-dedans, connaissait son boulot et il le maîtrisait. On tue, on ouvre, on vide, on tranche, et tout ça avec des gestes précis et sûrs. Moi, j’faisais un remplacement, j’étais au nettoyage des sols et du matériel, faut des jets puissants pour ça : des lances à incendie. Un abattoir ultramoderne, un truc performant. Voilà qu’à la fin d’une journée, il reste plus qu’une bête à tuer pour terminer le boulot. C’est le tour d’un petit cheval.
Angélina a un haut-le-cœur.
— Du cheval ?
— Oui, pour fournir les boucheries qui font ce genre de viande. Le seuil, tu vois ce que j’te disais ? Pour toi c’est le cheval ; pour les autres le chien, le chat ; dans d’autre pays, le porc, la vache. Chacun le sien. Donc, on est à la fin de la journée et le type chargé de l’abattre s’aperçoit que le petit cheval pleure. J’te jure, j’mens pas. Ça se passait à Chambéry, on doit s’en souvenir encore là-bas. Le gars appelle tous ceux qui sont dans les parages, moi avec : c’est la première fois qu’une chose pareille arrive. Le petit cheval a compris ; toutes les bêtes comprennent : l’odeur du sang, la vue, l’ouïe, l’instinct. Mais le petit cheval ne renâcle pas comme font les autres, il songe même pas à fuir ou à hennir. Non, il pleure, simplement il pleure. Deux grands yeux mouillés. Le gars qui devait l’abattre, il a pas pu. Personne d’autre non plus. Pas ce jour-là en tout cas.
C'est ce qui m'a valu l'infamie qualificative de "B.Bardot" de la part de quelques crétins prétendument spécialistes de livres jeunesse mais surtout ayatollahs du discours bien pensant carnivore. Or le passage de ce texte est entièrement basé sur les déclarations d'un ancien directeur de l'abattoir de Chambéry. Témoignage public puisque c'était à la radio, sur France Inter précisément il y a quelques années.
Un belle critique sur Croq'Livre en cliquant sur la couverture ci-dessous.