Parmi une soixantaines de titres sélectionnés pour la pré-sélection du Prix Ados (Rennes) se trouve La vérité crue, ce qui mérite d'être mentionné car ce livre fait l'objet d'un véritable tabou. Pourquoi ? D'après ce que j'ai pu constater, parce que le personnage principal (un enfant puis ado au fil des pages) fait le choix devenir végétarien et décide de se faire appeler Jésus-qui-sauve-les-bêtes par réaction aux souffrances infiligées aux animaux . S'il a choisi "Jésus" ce n'est pas par souci d'appartenance religieuse mais parce que cela évoque au contraire chez lui un profond traumatisme. Celui que chaque église réserve aux enfants qui y pénètrent en offrant à leur vue un supplicié sanguinolent, celui-là même censé être venu sauver les hommes d'après ses propres disciples... Au passage, notons qu'il y a là de quoi vous désespérer du genre humain... De vrais pervers ces cathos!
Végétarisme et Jésus: deux mots tabous, et il n'en faut pas moins pour effrayer pas mal d'adultes prescripteurs de bouquins pour la jeunesse.
Une anecdote: je suis reçu dans un collège de mon département pour rencontrer des élèves de 5éme. A l'issue de la rencontre, un élève dévoreurs de livres (ça existe encore) me demande quel est le dernier de mes romans parus. Je lui tends La vérité crue... Le documentaliste bondit tout à coup en lançant à mon jeune interlocuteur un tonitruant et définitif: "Ce n'est pas un roman pour ton âge!"
Qu'est-ce qui l'a donc effrayé à ce point dans mes pages ? La peur de voir des parents ulcérés venir le trouver en lui disant: "Depuis que vous avez fait lire à mon fils un de vos bouquins à la con, il ne touche plus à un morceau de viande"?
Pourtant, avec la lazagne chevaline et le surgelé à la bidoche verte de ces dernières semaines... ce documentaliste aurait pu répondre sans peine que ce bouquin rend plutôt un sacré service à ses lecteurs, non?